Gretel (Marguerite) DURLACHER

Gretel (Marguerite) DURLACHER © Amis de l'ancienne synagogue de KIppenheim

Marguerite (Gretel) DURLACHER,

 21 ans, allemande,
Arrêtée à: Saint-Junien, convoi 26

Née le 25-10-1921 à Kippenheim (Bade).

Marguerite (Gretel Rina parfois également appelée « Margot ») est la fille de Flora DURLACHER et la sœur de Jean (Hans).

Son père, Salomon est déjà décédé au moment où la guerre éclate (depuis le 04/01/1929 selon le site Alemannia Judaica).

La vie à Kippenheim dans les années 1930, Bade

Groupe d'enfants de Kippenheim avec le cantor Schwab, 1935
Photo de groupe des enfants de la communauté juive de Kippenheim, avec le cantor Schwab (né en 1893), 1935. Hans (10 ans) et Gretel (Marguerite, 14 ans) Durlacher sont indiqués par des flèches, ©Coll. S.Klarsfeld, ©K.Maier ©Amis de l’ancienne synagogue de Kippenheim

Avant-guerre, la famille Durlacher était une famille qui s’était spécialisée dans le commerce de vin depuis plusieurs générations.

Le site Alemannia Judaica atteste de la présence des Durlacher et d’une boutique de vins et liquoreux  tenue par Flora au niveau de la rue principale (13 Obere Hauptstraße 13, Kippenheim) de Kippenheim mais les ancêtres de la famille étaient présents à Kippenheim dès le début du XIX° siècle.

Flora tenait donc seule ce commerce familiale depuis le décès de son mari en fournissant les restaurants  Les affaires allaient mal depuis le boycott de 1933.

Gretel quant à elle était apprentie commerciale dans l’entreprise WERTHEIMER à Kippenheim (ferronerie) [Sabine Herrle].

Concernant la vie communautaire à Kippenheim à l’époque, elle était très vivante et structurée (avec de nombreuses associations ou structures cultuelles communautaires) et on comptait en 1933 encore 144 juifs (soit 7.8% de la population totale de Kippenheim) avant l’émigration de beaucoup de familles au moment du boycott économique*.

Sur la photographie de groupe (ci-dessus) datant de 1935 que l’on retrouve également dans l’ouvrage du témoin et survivant Kurt MAIER , on peut apercevoir Gretel juste à côté du cantor SCHWAB (né en 1893) parmi les enfants de communauté juive de Kippenheim. La photographie a été prise derrière la synagogue.

Parmi les noms de familles connues à Kippenheim, on retrouve parmi les patronymes les plus fréquents les noms  « WERTHEIMER »,  « AUERBACHE » et « VALFER ».

Le tournant de la « Nuit de Cristal », 9-10 novembre 1938

Salle de prière de la synagogue de Kippenheim, le jour de la « Nuit de Cristal », 10/11/1938, ©Amis de l’ancienne synagogue de Kippenheim

Or, après  la « Nuit de Cristal » des 9/10 novembre 1938, tout bascule pour cette jeune femme et sa famille.

A Kippenheim, des hommes, des vieillards sont arrêtés, molestés et la synagogue et les magasins appartenant à des juifs sont détruits. 14 hommes de la communauté (dont l’oncle de Gretel, Bertold, 77 ans) seront ensuite déportés à Dachau. C’est une atmosphère de terreur qui règne alors à Kippenheim.

Par ailleurs, durant la nuit du pogrom, les lampes et vitres de leur maison sont brisées, les meubles endommagés [Sabine Herrle].

La fuite en France, Strasbourg , décembre 1938-juillet 1939

Aussi, très peu de temps après, en décembre 1938, Flora décide d’envoyer d’abord son fils en France pour le protéger. En effet, son frère, le Dr Sally Epstein ainsi que  sa mère, Sophie EPSTEIN, née BURGER y vivent tous deux.

Entre temps, en Allemagne,en janvier 1939,  l’oncle Berthold est libéré de Dachau où il fut torturé, mais en contre- partie, les Nazis impose à la famille son émigration immédiate et la vente de leur maison et leur commerce à un prix dérisoire. Elle ne sera d’ailleurs jamais payée en retour.

C’est ainsi que Flora et Gretel émigrent en France et finissent par retrouver Hans à Strasbourg le 18/07/1939 chez le frère de Flora, Sally EPSTEIN  au 2, rue Wencker à Strasbourg, jusqu’à la veille des hostilités.

 L’arrivée à St-Junien en aout 1940

Avec l’annonce du déclenchement de la guerre, en septembre 1939 est alors organisée l’évacuation du Bas-Rhin dans le centre de la France, dont la Haute-Vienne.

A St-Junien, c’est la commune de Shiltigheim (qui jouxte Strasbourg) qui est accueillie. Ce sont des milliers d’évacués qui arrivent alors parmi lesquels Sally Epstein et Sophie Epstein.

Cela dit, les Durlacher transitent d’abord dans un premier temps dans la vile de  Gray, en Haute-Saône, 2, rue de l’Abreuvoir.

Ils rejoignent ensuite les leurs à St-Junien le 30/08/1940.

Là, ils vivent alors route de St-Brice chez un fermier au lieu-dit « Le Belvédère » avec leur grand-mère, Sophie.

A St-Junien, on sait par le témoignage  de Mme Silberschlag Berthe et de Frieda König qui connaissaient la famille que Gretel et sa mère avait un atelier de couture où elles fabriquaient des cordets et des sous-vêtements entre 1940-1942, [source Sabine Herrle].

L’arrestation de la famille en zone libre le 26 août 1942

Mais dans la nuit du 26 aout 1942 la famille est arrêtée par la gendarmerie française dans le cadre de la rafle du 26 aout.

Gretel est ensuite déportée à Auschwitz (sans retour) avec sa mère et son frère Hans par le convoi 26.

Grâce à Sabine Herrle et ses recherches dans les fonds de restitution allemands, nous savons que Gretel n’est peut-être pas décédée à son arrivée à Auschwitz  et qu’elle a donc possiblement été selectionnée pour le travail à son arrivée** .

En effet, d’après le témoignage d’une co-détenue de sa mère à Auschwitz  (Mme Else KAHN originaire du Luxembourg), Gretel serait morte avant sa mère (elle-même décédée à l’été 1943, la date estimée étant le 30/06/1943).

©Fanny Dupuy, Sabine Herrle

Dernières révisions: le 30/07/2023

NB:

*Les derniers juifs de Kippenheim furent déportés le 22/10/1940 à Gurs, source Alemannia Judaica.

** A l’arrivée du convoi 26 à Auschwitz, seulement 12 hommes et 27 femmes furent immatriculés. Parmi les 31 rescapés de ce convoi, en 1945, il ne restait qu’une seule femme en vie.

Source: 1945, Les rescapés juifs d’Auschwitz témoignent, A.DOULT, S.Klarsfeld, S. Labeau, FFFDJF, 2015, p.140

Remerciements:

mes remerciements à ceux qui ont pu aider à reconstituer ce parcours, parmi eux, je remercie pour leur aide:

  • Mr Baroulaud, archiviste de la ville de St-Junien
  • Alexandre Doulut qui a bien voulu encore une fois prendre de son temps pour vérifier certaines informations
  • un grand merci également à Mr  Jean-Louis Spieser pour la traduction et les précisions en lien avec le reportage sur Hans Durlacher

Sources:

Sources allemandes (Sabine Herrle):

  • Archives départementales de Frieburg
  • Témoignage de Kurt MAIER: Kurt Salomon Maier, Unerwünscht. Kindheits- und Jugenderinnerungen eines jüdischen Kippenheimers. Ubstadt – Heidelberg-Neustadt a.d.W. – Basel 2011, Seite (page) 30, 71
  • Historischer Verein für Mittelbaden e.V., Mitgliedergruppe Ettenheim. Schicksal und Geschichte der jüdischen Gemeinden Ettenheim, Altdorf, Kippenheim, Schmieheim, Rust, Orschweier. Ettenheim 1988

Darin:

Jürgen Stude, Der Novemberpogrom in Kippenheim: S. 45-47

Jürgen Stude, Geschichte der jüdischen Gemeinde Kippenheim. S. 322-362

  • Hedy Epstein, Erinnern ist nicht genug. Autobiographie. Münster 1999
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